L’accouchement par les matrones

L’accouchement par les matrones fut pendant longtemps la pratique la plus répandue en France. Jusqu’au  XXème siècle, les  femmes ont traditionnellement accouché chez elles, quel que soit leur milieu social. Au XVIème siècle les femmes issues de la bourgeoisie ou de l’aristocratie étaient  suivies par un médecin ou un chirurgien alors que les autres, issues de conditions plus modestes, étaient accouchées par des matrones. Selon la définition du dictionnaire, une matrone exerçait illégalement le métier de sage- femme ou pratiquait des avortements. Au Moyen-Age la matrone était plutôt une femme d’âge mûr. On pouvait devenir matrone à partir de quarante ans. Il fallait avoir été mère car cela était un signe d’expérience et une marque de respect et de moralité. En général  on était matrone de mère en fille et l’on se repassait les secrets du métier. En milieu rural, ces femmes étaient pour la plupart, illettrées. L’accouchement par les matrones était bien loin des standards d’hygiène que nous connaissons. Les matrones ne se lavaient pas les mains et ignoraient tout de la prophylaxie . Les femmes ne souhaitaient pas accoucher à l’hôpital car les filles mères qui avaient subies les assauts de leur patron en tant que petite  bonne à leur service s’y rendaient pour accoucher à l’abri du voisinage. La théorie sur les microbes n’avait pas encore été découverte et la maladie et la mort se propageaient facilement en hôpital par manque d’hygiène. Ce lieu n’attirait donc pas les femmes et cela pendant longtemps, jusqu’aux années 1930.

Accoucher chez soi  : une affaire de femmes

En effet, les femmes de toutes les générations confondues se retrouvaient à l’occasion de chaque naissance, que ce soit la famille ou  les voisines venues pour donner leur avis, observer, échanger, aider. Cette épreuve dans la vie des femmes leur permettaient de renforcer les liens entre elles. Elle  redoutaient d’accoucher  en raison du fort taux de mortalité. L’accouchement ne se vivait pas de manière intime mais de manière communautaire où la future mère avait  besoin du soutien de toutes : certaines préparaient le lit, d’autres  les linges et l’eau. Elles prenaient place  dans la pièce principale, se saluaient selon les règles de bienséance et selon leur rang. On allumait  un feu de bois pour maintenir une température agréable pour la mère et l’enfant. Les femmes les plus pauvres accouchaient dans l’étable dans laquelle la chaleur était  fournie par les animaux.

Les pères  ne participaient en aucun cas à cet événement par incompétence et par pudeur. Accoucher grâce à un médecin ou un chirurgien au XVI ème siècle, n’était pas une garantie contre la mort en couches car l’obstétrique n’en était alors qu’à ses débuts.

Le statut de la sage-femme

L’obstétrique a commencé à évoluer vers des pratiques plus structurées à partir du XVIII° siècle et les sages-femmes ont commencé à être reconnues   notamment en ville.   Cependant, l’accouchement par les matrones reste majoritaire dans les campagnes. Avec  « L’abrégé de l’art des accouchements » », en 1759, Mme Angélique Le Boursier du Coudray consigna les meilleurs pratiques visant à assurer l’accouchement dans des conditions permettant de « …sauvegarder la vie de la mère et celle de l’enfant ». A partir du 19e siècle, la réglementation, la professionnalisation et la formation confèrent aux sages-femmes un véritable statut et un rôle déterminant dans la pratique obstétrique en France.

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